Adieu émouvant au port.
Les larmes sont rapidement essuyées par le vent frais.
L'activité intense à bord redirige mon attention :
Il faut lancer les voiles ! Où était encore la drisse du foc intérieur ?
Je ne m'en souviens plus mais quelqu'un me dit où il se trouve.
Une fois le cap défini, tout le monde est affecté à l'un des deux groupes de surveillance,
dans un mélange 50/50 d'hommes et de femmes.
Le planning « suédois » de 4/4/4/6/6 heures commence, c'est à dire qu'un seul des deux groupes dormira en même temps.
En quelques jours, tout le monde a désormais la possibilité de « profiter » de moments étranges et moins étranges sur le pont.
Le manque de sommeil qui en résulte peut être assez intimidant pour le débutant,
combiné au mauvais temps, aux émotions exacerbées, tout à bord est si différent du monde à terre.
Cela m'a vraiment fait craquer. Mais on n'est jamais déçu ni sous pression dans cette famille unique où chacun veille sur l'autre.
Pendant les premières semaines de ce voyage hivernal, on n'a jamais assez de couches enroulées autour de soi,
pour éviter que le froid ne s'infiltre par les pieds, les mains et le visage pendant la garde de nuit.
Il se peut simplement que vous ne puissiez plus passer par la petite porte de la cabine de toilettes que vous devrez utiliser tôt ou tard.
De temps en temps, le chef de quart ordonne quelques ajustements des croisillons voire un virement de bord pour optimiser la trajectoire du navire. Ce
nous fait exercer et nous échauffer.
Pourquoi est-ce que je fais cela? Je ne sais pas. Mais je suis convaincu que c’est la bonne chose à faire pour moi.
Je suis payé avec des moments inoubliables tels que :
Un seau d'eau de mer où je me lave les mains le soir dans un tourbillon scintillant de plancton fluorescent,
Surface de la mer en nappe près de l'île de Wight sans le moindre bruit,
Des dauphins nageant à côté de nous une nuit de pleine lune,
Joyeuse balade sur les vagues sous le soleil près des côtes bretonnes pendant que je barre,
mais surtout, un groupe de personnes avec une confiance mutuelle 100%,
apprendre/enseigner le matelotage du marlinspike sur un gréement carré vieux de 100 ans.
J'aimerais être avec eux plus longtemps.
C'est un privilège de faire partie de ce monde complètement différent, malgré tous les inconvénients.
Où la vie se concentre sur l’essentiel et où l’horizon est large et lointain.
Michael, le Catweazle.